« Le Christ est ressuscité ! »… « En vérité, Il est ressuscité ! »[1]. Jésus est ressuscité, c’est là un fait que nous chrétiens proclamons solennellement au jour de Pâques, notre plus grande fête. C’est le cœur même de notre foi. Elle en est le fondement. « Si le Christ n’est pas ressuscité, vide est notre message, et vide aussi est votre foi. »[2]
Si on supprime la foi en la résurrection, ou si même on la relativise, alors le message de l’évangile est sans doute digne d’attention. C’est une conception religieuse, une vision du monde voir une philosophie qui en vaut bien d’autres. Jésus dissocié de son prédicat « Christ » demeure alors certes une figure intéressante, mais en réalité, c’est un échec, et nous, nous ne sommes plus chrétiens !
La résurrection du Christ n’est pas objet d’opinion. Elle est le fondement de la foi chrétienne[3]. C’est certainement là la plus grande radicalité du christianisme[4] ! Car, soit il est ressuscité, ou il n’est pas ressuscité ! Il n’y a pas de situation intermédiaire, il n’y a pas d’entre-deux. On ne peut pas y croire à moitié seulement. C’est cette foi en la résurrection qui va changer notre vision de toute chose[5].
Notre mort n’est plus notre fin, nous aussi nous ressusciterons[6]
« Moi, je suis la résurrection et la vie. Celui qui croit en moi, même s’il meurt, vivra ; quiconque vit et croit en moi ne mourra jamais. Crois-tu cela ? »[7]
La résurrection de Jésus n’est pas un simple miracle d’un cadavre réanimé. Cela n’a pas de réel intérêt. La résurrection de Jésus est d’un autre ordre que la résurrection de Lazare qui nous est rapportée dans l’évangile et de celle du jeune de Naïn. Dans ce cas, il s’agit d’un retour à la vie qui ne les empêchera pas de mourir plus tard.
Le Christ, par sa résurrection qui paradoxalement est devenue une réalité de notre histoire, arrache le monde à la mort dans laquelle celui-ci est captif. L’homme, « périssable comme la fleur des champs»[8], trouve désormais dans la résurrection du Christ une raison d’espérer. Si Jésus est sorti vivant du tombeau, ce n’est pas pour lui, c’est pour nous. Sa résurrection est le gage que nous ressusciterons nous aussi (1 Corinthiens 15, 20-28). L’humanité est, en effet, promise à une vie avec Dieu et avec toute l’humanité réunie. Dans cette vie, l’être humain ne sera pas dépersonnalisé, mais glorifié comme le Christ (Romains 6, 4 ; Colossiens 3, 4). Il sera reconnu des siens qu’il retrouvera pour toujours. Un tel état est impossible à représenter, pourtant il découle de la foi au Christ, au ressuscité.
Cette mort ou plutôt l’obsession de la mort qui mine de l’intérieur[9] est maintenant dernière nous, c’est le symbole du baptême chrétien, nous avons maintenant une vie éternelle devant nous.
La résurrection appelle à l’espérance.
« Mais dans toutes ces choses nous sommes plus que vainqueurs par celui qui nous a aimés. Car j’ai l’assurance que ni la mort ni la vie, ni les anges ni les dominations, ni les choses présentes ni les choses à venir, ni les puissances, ni la hauteur, ni la profondeur, ni aucune autre créature ne pourra nous séparer de l’amour de Dieu manifesté en Jésus Christ notre Seigneur »[10]
L’espérance, nous le savons, est une des trois vertus théologales que nous connaissons[11], elle a pour objet principal le salut. C’est-à-dire atteindre une plénitude, être vraiment soi-même[12]. La résurrection du Christ promet la vie et la communion avec Dieu pour tout homme. Cette promesse sera accomplie au terme de l’histoire quand « le dernier ennemi de l’homme », la mort, sera détruite (1 Corinthiens 15, 26). Tant que dure l’histoire, la résurrection invite à l’espérance. Nous espérons non seulement la vie éternelle, mais au sein même des difficultés humaines, nous gardons toujours l’espérance que rien n’est définitivement perdu. Qu’il vienne de l’inimitié des hommes ou des épreuves liées à notre finitude, aucun obstacle ne peut « nous arracher à l’amour du Christ » (Romains 8, 38-39). Le Christ ressuscité donne un sens à la succession des temps qui paraissaient être un éternel recommencement. Désormais, l’histoire est orientée vers celui qui en est la signification sans pour autant que le ressuscité bouleverse le cours ordinaire du temps. Il laisse les temps aller jusqu’à leur terme.
Christ est vivant et marche avec nous.[13]
« Notre cœur n’était-il pas brûlant en nous, tandis qu’il nous parlait sur la route et nous ouvrait les Écritures ? »[14]
Que veut dire « suivre Jésus Christ » sinon de marcher quoiqu’il arrive fidèlement avec Lui tout au long de notre vie, en faisant Sa volonté, tout en étant soumis et obéissant à Sa parole ?
En lisant les écritures, nous voyons que dès le commencement, Dieu a toujours pourvu aux besoins de ceux qui marchaient avec Lui. Quels que soient les évènements dans le monde, les serviteurs de Dieu n’ont pas été prisonniers des peurs et des angoisses de leur époque. Leur marche avec Dieu les a préparés à tout, bien qu’ils connaissent beaucoup d’épreuves et de difficultés dans leur vie.
La résurrection nous ouvre une nouvelle façon de comprendre l’existence humaine et le devenir du monde. La vraie vie c’est de marcher au côté du Christ, chaque jour, et ce jusqu’au dernier jour. Et cette vie, parce qu’elle n’est pas issue du hasard, mais de l’amour de Celui qui nous a fait exister et que nous appelons Dieu, parce que cette vie nous l’avons passée à marcher ses côtés, elle ne retombera pas dans le néant.
Nouvelles relations aux autres et au monde
« Servant les pauvres, on sert Jésus Christ. O que cela est vrai ! Vous servez Jésus Christ en la personne des pauvres. Et cela est aussi vrai que nous sommes ici. »[15]
Si le Christ est le Fils de Dieu et frère des hommes, ceux qui croient en lui se doivent de vivre en frères parce qu’ils bénéficient de l’amour d’un même Dieu et Père. Ils sont appelés à approfondir leur humanité plus grande. Les relations aux autres sont à vivre désormais dans l’amour et le respect réciproque considérant « tout homme comme un frère pour qui le Christ est mort » (Romains 14, 15).
Le Christ de la résurrection éclaire la vocation de tout être humain qui comprend alors quel est son rapport à la création. La création, toute écrasante qu’elle soit parfois, n’est pas un obstacle entre l’homme et Dieu. Elle est au contraire le lieu par excellence où s’exprime le rapport de l’homme à Dieu. L’homme ne peut l’ignorer pas plus qu’il ne peut l’exploiter sans mesure. Non seulement il dépend de la création pour sa vie et sa survie, mais encore il est chargé d’en exprimer le sens.
Une autre vision de Dieu
« Au commencement était la Parole, et la Parole était avec Dieu, et la Parole était Dieu. Elle était au commencement avec Dieu. Toutes choses ont été faites par elle, et rien de ce qui a été fait n’a été fait sans elle. En elle était la vie, et la vie était la lumière des hommes. … [16]»
Dieu n’est pas celui qui condamne l’homme et qui serait indifférent à voir sa créature et sa création s’abîmer dans la mort. Parce qu’il aime l’homme comme la création, il vient au-devant de lui et intervient dans l’histoire pour s’y manifester. En arrachant son propre Fils à la mort par la puissance de l’Esprit, il appelle tous les hommes à la communion de vie avec lui, car il est le Dieu des vivants. Il révèle qu’il aime l’homme au-delà de ce que nous pouvons imaginer et que l’homme est capable à son tour d’aimer comme Dieu aime.
Un Dieu infiniment humble et Amour, mais aussi tout puissant[17]. Dieu a le pouvoir de vaincre la mort et donc le mal, Il l’a démontré par la résurrection.
Conclusion
« J’ai voulu avoir l’intelligence de ce que je crois Seigneur autant que j’ai pu ; autant que tu m’as donné la force, je t’ai cherché. Et j’ai voulu avoir l’intelligence de ce que je crois, et j’ai beaucoup discuté, et j’ai beaucoup peiné ».[18]
Le père Patrick Willocq a dit cette réflexion que je trouve superbe : « Plus on s’approche du sacré, plus il faut pouvoir rester modeste et accepter nos limites de compréhension humaines». Avec la résurrection, on touche vraiment au cœur du Mystère, il nous faut donc rester très modestes, accepter que l’on ne puisse que se servir des outils intellectuels[19] dont nous disposons pour l’exprimer. Cette expression sera donc toujours incomplète et critiquable. Cette attitude de modestie est importante, car elle nous permet de retrouver Dieu comme Celui qui est à la source de notre l’appel et donc de notre foi.
« si vous ne croyez pas, vous ne comprendrez pas »[20], l’intelligence doit se mettre au service du cœur[21] et de la foi. Elle ne doit pas pour autant être négligée, car en retour, la foi est un appel qui s’adresse à l’intelligence et à la volonté de l’homme.
Au moment où beaucoup de contemporains sont désorientés par les bouleversements de notre société, ou sont dans l’inquiétude et l’incertitude face à l’avenir, nous devons témoigner avec notre foi, avec notre cœur, avec notre intelligence que le Christ ressuscité est notre présent, notre avenir et notre espérance.
Personne ne sait où l’Évangile me mènera encore… Ce que j’ai appris par contre, c’est que le lieu de la Parole n’est jamais un lieu tranquille ; La Vérité entre souvent dans le monde dans le déchirement. L’existence de Jésus s’est terminée sur une croix, dans un abandon total, le silence de Dieu fut la seule réponse à son dernier cri. Pourtant ce ne fut pas la fin, il y’a eu la lumière de la résurrection. Comme tous ceux qui se réclament de Lui, je ne suis pas à l’abri de l’épreuve, mais je sais que la lumière de la résurrection nous sauvera.
Jacky
« Celui qui a vraiment rencontré le Christ ressuscité ne peut le garder pour lui-même. Il doit l’annoncer. » (JP II, Novo millenio ineunte, n°40)
[1]Orthodoxwiki : La salutation pascale est une coutume des chrétiens orthodoxes. Pendant la période pascale, depuis la nuit de Pâques jusqu’à la veille de l’Ascension, à la place des salutations habituelles (« Bonjour » ou autre), les orthodoxes se saluent de la manière suivante : l’un dit « Le Christ est ressuscité ! », et l’autre répond « En vérité, Il est ressuscité ! ». Cette salutation est la réactualisation de l’annonce de la bonne nouvelle de la résurrection du Christ, que les disciples se sont donnée (cf. Luc 24, 34).
[2] 1 Cor 15, 14
[3] Selon un sondage de La Croix ; il y a pourtant des gens qui se disent chrétiens et qui ne croient pas à la résurrection. Ils seraient près de 25% !
[4] Extrait d’unInterview de Maurice Bellet :« Quant à la radicalité que vous évoquez, elle n’est pas de moi, mais de cet autre dont parle l’Évangile. Connaissez-vous un paradoxe plus radical que cette histoire de Dieu fait homme, supplicié sur une croix pour avoir subverti la religion en prêchant l’amour, et resurgi trois jours après pour nous inviter à une vie qui est hors des lois de ce monde ? Avouez que cela bouleverse le paysage ordinaire et oblige à se poser des questions, à revenir à ce qui constitue l’essentiel de la foi plutôt qu’à gloser autour. J’ajouterai que cette radicalité évangélique, pour abrupte qu’elle soit, n’est pas un fardeau. C’est une annonce heureuse, qui invite chacun à vivre et à aimer selon son chemin. »
[5] Les lectures de ce TP sont éloquentes à ce sujet ; On y voit comment les disciples nées dans la religion juive ébranlent l’ordre ancien pour sans cesse créer la vérité. La foi chrétienne va a radicalement transformée leur religiosité de l’intérieur.
[6] Dans la structure et le contenu, il y a de nombreux emprunts à l’article :« Jésus est ressuscité…qu’est-ce que cela change ? La réponse de Chantal Reynier », Chantal Reynier, professeur d’exégèse aux facultés jésuites de Paris
[7] Jn 11 :23
[8] Isaie 40, 6-7
[9] Je ne suis pas familier avec le sujet, mais lorsque je suis à l’écoute du monde, cette peur de la mort semble avoir quitté le monde théorique de la philosophie (Nietzsche, Freud ;…) pour le monde bien concret de la psychiatrie où la sensation constante de mort imminente, les angoisses morbides chronique paralysent de plus en plus de gens.
[10] Romains 8 :37-39
[11] les deux autres étant la foi et la charité
[12] Albert Vinel : « CEP : Christologie » 3ème journée
[13] S.S.le Pape Francois : twitter 5 Apr 2015
[14] Lc 24 :32
[15] saint Vincent de Paul (1581 – 1660)
[16] Jn 1 :4
[17] Les Symboles de la foi « Je crois en Dieu, le Père tout-puissant …
[18] Saint Augustin d’Hippone (354-430)
[19] Qu’ils soit Philosophique, sociologique,
[20] Is 7, 9
[21] « notre cœur n’était-il pas tout brûlant au-dedans de nous, quand il nous parlait en chemin, quand il nous expliquait les Ecritures ? » (Luc 24, 32)