« Tu aimeras le Seigneur ton Dieu, et ton prochain comme toi-même » (Mt 22, 34-40)


30 ème Dimanche ordinaire

Je ne sais pas quelle est votre impression en écoutant ce passage d’évangile. Personnellement, au premier abord, j’ai une impression de « rabâché », de déjà entendu. Cette page-là, on la connaît. On la connaît depuis toujours. Depuis notre enfance, « Tu aimeras Dieu, tu aimeras le prochain ».

Quand on demande à un enfant de citer une parole de Jésus, neuf fois sur dix, il dit : Aimez-vous les uns les autres.

Impression de rabâché. Mais aussi, sentiment d’avoir affaire à un mot piégé. Le verbe « aimer » est mis à toutes les sauces,

et pourtant, il recouvre des réalités tellement différentes.

En français, on n’a qu’un même verbe pour dire : « J’aime le fromage », « j’aime ma femme », « j’aime Dieu ». il ne s’agit pas cependant du même sentiment ni de la même chose.

Mot piégé donc. Mot galvaudé aussi, quand on voit tout ce qu’on a fait au nom de l’amour : toutes les hypocrisies,

les chantages et autres déformations possibles.

 

Enfin dernière difficulté : pourquoi un ‘commandement’ de l’amour ? Commander à quelqu’un d’aimer, est-ce possible ? Quand on n’aime plus quelqu’un, quand un mari n’aime plus sa femme, quand une femme n’aime plus son mari, ils ont beau faire, c’est difficile de ‘raccommoder les morceaux’. Quand Jésus nous rappelle le commandement : Tu aimeras ton Dieu et tu aimeras ton prochain, instinctivement nous pensons : « Est-ce qu’on peut commander d’aimer ? » L’amour est quelque chose de tellement naturel, de tellement spontané !

 

Ajoutez à tout cela une impression d’inefficacité totale :

cela fait trente-deux siècles que ce commandement a été promulgué sur le Sinaï, quand Dieu l’a donné par l’intermédiaire de Moïse ! Trente-deux siècles qu’il est proclamé, rabâché, d’abord dans le peuple israélite, ensuite chez tous les chrétiens du monde ! C’est même la loi fondamentale des chrétiens : « Tu aimeras ! » Vingt siècles qu’on lit cette parole dans toutes les églises, qu’on l’apprend aux enfants, qu’on la répète aux adultes. Aujourd’hui même en ce dimanche, il va y avoir au minimum deux à trois cent millions d’hommes, de femmes, de jeunes, d’enfants, à travers le monde, qui entendront proclamer cette même parole,

ce même commandement : « Tu aimeras. » Et qu’est-ce que ça va changer ? Rien ou pas grand chose si on ne vit pas ces paroles concrètement. Tout à l’heure on nous donnait pourtant  des conseils très pratiques concernant l’accueil de l’immigré,

le respect de la veuve, de l’orphelin, de quiconque est dans le besoin. On peut aimer avec des mots et des bonnes intentions, on peut aussi aimer avec des actes bien concrets.

 

Dans une des ses lettres saint Jean nous le dit autrement :

On ne peut pas aimer Dieu qu’on ne voit pas si on n’aime pas le prochain qu’on voit. Et la petite Thérèse de l’Enfant Jésus l’avait très bien compris elle aussi lorsqu’elle écrivait que l’amour était tout et qu’elle avait très bien réalisé que s’il cessait d’exister, les martyrs ne verseraient plus leur sang,

les missionnaires ne partiraient plus jusqu’au bout de la terre, les apôtres ne prêcheraient plus: l’amour contient tout,

il remplit tout, il est tout. « Oui ma vocation s’écriera t elle, c’est l’amour ! Dans le cœur de l’Eglise, ma Mère, je serai l’amour. » .

 

Et si frères et sœurs, nous mettions un peu plus d’amour dans notre quotidien, dans nos relations mutuelles ? Ne dit-on pas d’une chose bien faite « c’est fait avec amour » ? Nos relations avec nos proches sont parfois tellement engluées par l’habitude, la monotonie, la superficialité que nous avons oublié parfois de nous aimer, de le vivre et de le montrer.

C’est un peu comme une voiture : elle a deux lampes à l’avant. On peut toujours rouler avec seulement une lampe allumée mais ont voit tout de suite que çà ne va pas et en plus c’est très dangereux. Il faut rouler avec les deux lampes allumées comme il faut aimer Dieu et aussi aimer son prochain, faire l’un sans oublier l’autre, aimer les autres mais aussi avant tout aller à la messe tous les dimanches.

 

Alors tournons-nous vers Dieu, Source de tout amour vrai et sincère et demandons-Lui au moment de recevoir son Corps livré pour nous par amour, de réinsuffler de l’amour là où il n’y en a plus guère dans nos vies.

Père Mohan

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