Ma première réaction en entendant ce discours du Christ, c’est de m’écrier: “C’est trop difficile ! C’est même impossible ! » Alors, je ne marche plus, je laisse tomber. Déjà le fait d’observer scrupuleusement, honnêtement les commandements, c’est difficile, mais cette fois Jésus va trop loin ! Ne pas tuer, çà va, ce n’est pas trop difficile. « Moi mon cher Monsieur, je n’ai jamais tué ni volé quelqu’un » me disent souvent beaucoup de gens qui parce qu’ils ne commettent pas ce grand péché s’imaginent qu’ils ne doivent jamais se confesser et qu’ils ne sont pas pécheurs.
Mais ne pas se mettre en colère ? Cela arrive bien à tout le monde! De même, ne pas commettre l’adultère, c’est faisable. Mais ne jamais désirer la femme ou l’homme que l’on rencontre sur son chemin est-ce possible ? Et est-ce si mal que çà de faire des serments ? Bref, j’ai envie de rejeter tout çà en bloc, parce que çà me semble trop difficile. Et pourtant, je pressens dans ces paroles comme un appel à un mieux-vivre.
La première lecture de ce jour nous mettait déjà sur la bonne piste : vivre, c’est choisir. Je ne suis pas un robot. J’ai la possibilité de faire des choix, de ne pas subir ma vie, de ne pas être conditionné uniquement par mes instincts. Je peux choisir entre le bien et le mal, entre la vie et la mort, entre mon bonheur et mon malheur. C’est très important à une époque où tant de gens disent : « J’y peux rien, je suis comme çà, je ne changerai pas ! » Oui je suis libre, mais pas pour faire n’importe quoi. Ma liberté, ce n’est pas l’absence de toute règle. Au contraire, cette loi que Dieu a transmise à Moïse, n’est pas un loi arbitraire, fixée par un Dieu en mal de montrer que c’est lui le chef, que c’est lui qui commande.
C’est un peu comme si je vous disais : « Si tu te jettes par la fenêtre du huitième étage, tu meurs !» Cette loi pose des balises, elle me dit : « Si tu sors de cette route, tu risques de te perdre. »
Donc je suis amené à faire des choix d’une importance vitale.
En gros, Jésus nous invite à aller au-delà de la loi, à en percevoir le sens profond. Si tu te contentes de ne pas tuer,ce n’est pas suffisant. Il y a mille manières de tuer quelqu’un, en paroles ou par des attitudes. Le péché n’est pas quelque chose en l’air, il est en nous, là où naît notre liberté, notre désir. C’est bien de s’abstenir d’actes mauvais, mais il faut aller plus loin. C’est au fond de nous-mêmes qu’il faut faire le ménage : un bon coup de balai au fond de ton cœur, là où est la racine de tous les mauvais désirs. Le bonheur que nous prêche Jésus n’est pas dans la satisfaction instantanée de nos instincts, çà c’est pour les animaux, il est dans des choix librement assumés, balisés par des siècles de sagesses et des générations entières de gens qui nous ont montré que cette route-là, ce chemin-là mène au vrai bonheur.
Père Mohan,